La fille de la femme blanche

 

Toubabous

 

Ça fait bientôt un an que je circule à Bobo-Dioulasso sur mon vieux vélo chinois, dont je dois faire réparer les pièces chaque semaine.  Mais on ne s’y habitue pas.  Partout où je passe, la vie s’arrête, le temps de regarder la toubabou peiner dans les rues ensablées du quartier; s’arrêter pour laisser passer un troupeau de zébus imposants, puis reprendre la route du dispensaire.

 

Une toubabou, c’est riche.  Ça déambule dans un 4x4, au logo d’une ONG, la clim à fond.  Le vélo, c’est pour les villageois, les va nu-pieds.  Ceux qui ne peuvent même pas se payer un taxi à moins d’un dollar la course.  Pourtant, j’habite une belle villa.  J’ai un gardien de nuit qui arrose notre jardin chaque jour avec de l’eau payée au litre.  J’emploie une nounou qui prépare 3 repas par jour à une famille qui voyage fréquemment.  Mais voilà, je pars au travail sur 2 roues.

 

À la pause du midi, en chemin inverse, les petits du quartier ont pris l’habitude de m’attendre dans le champ au coin de la rue.  Ils sautent de joie en m’apercevant, et se mettent à sauter, à taper des mains, à chanter : « Toubabou!  Toubabou!  Toubabou! »  Je leur envoie la main, un sourire, c’est ma fête.  Aujourd’hui, dans la trentaine de petites têtes foncées, tressées, une paire de yeux bleus aux cheveux blonds.  Elle s’amuse bien, sautant, claquant des mains, à l’unisson dans son chant : « Toubabou!  Toubabou!  Toubabou! »

 

À l’entrée de la villa, mon chum m’attend.

-        « Tu as vu Manu?  Elle est sortie avec sa copine et n’est pas encore revenue pour diner. »

-        « Oui, oui.  Juste au coin, dans le champ.  Elle apprend les coutumes locales. »

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